Restaurant de la Plage et Maison de la Pêche

Hôtellerie - Tourisme

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Restaurant de la Plage et Maison de la Pêche, Genève

HISTORIQUE/SITUATION

Posés sur le lac, les deux objets s’inscrivent dans le cadre général d’une nouvelle plage publique créée dans le quartier des Eaux-Vives. Initiée en 2006, l’aventure verra rapidement surgir tous les écueils propres aux projets de très grande envergure où se confrontent enjeux écologiques et aménagement territorial, dispositions légales et procédures complexes, développement économique et intérêt commun. La détermination des différents protagonistes –mais également leur écoute attentive face aux revendications–, viendra toutefois à bout des blocages. En 2013, le travail de concertation permet aux autorités de dévoiler à la population un projet prenant en compte les différents besoins, en pleine adéquation avec l’imposant appareil légal concerné. Cette audacieuse proposition architecturale et paysagère devra notamment inclure un restaurant et un bâtiment pour les professionnels de la pêche.

PROGRAMME

Pari risqué sous le ciel genevois, le restaurant a pour ambition d’être ouvert toute l’année, avec une partie destinée à la vente à emporter et un large espace réservé à la restauration assise. La salle permet de servir une centaine de couverts, alors que la terrasse peut accueillir deux cents personnes. L’ensemble est évidemment équipé d’une cuisine professionnelle complète, avec l’indispensable panoplie de locaux de service, vestiaires et toilettes. Appelé Maison de la pêche, l’autre édifice réserve notamment ses surfaces aux cinq pêcheurs professionnels des quais marchands. Dans une répartition simple et efficace, il offre en outre différents bureaux ou salles de réunion, quelques locaux sanitaires et une écloserie pour les poissons du lac.

PROJET

Les deux bâtiments concentrent leurs activités sous un faible gabarit, bien adapté au paysage des bords du Léman. L’implantation du restaurant et la disposition de sa terrasse permettent une ouverture à 360°, avec vue imprenable sur la rade. La structure de ce complexe se compose d’une quinzaine de travées de profils en métal galvanisé, le tout reposant sur des rangées de pieux en béton et acier profondément enfoncés dans le lac. Une prédalle en béton avec isolation thermique hydrophobe en fond de coffrage fait office de plancher sous la surface intérieure réservée au personnel et à la clientèle. L’agréable promenade extérieure est en carrelets de mélèze. Un habile système constructif dédouble la toiture, sensible aux problèmes de réchauffement. Le concept de régulation climatique comprend bien entendu la fraîcheur du lac et l’ombrage côté Sud, mais également une façade Nord dont la mobilité déclenche une mise en convection de l’air et un abaissement général de la température.

Plus près du quai Gustave-Ador, la Maison de la pêche fait face au plan d’eau du port de la Société Nautique de Genève. Avec onze travées, cette construction est globalement édifiée selon les mêmes principes (structure ou matériaux) que le restaurant. S’ajoutent néanmoins quelques murs de refend en maçonnerie et, côté port, un sol extérieur en caillebotis métalliques. Une toiture à faible pente surplombe avec ampleur le bâtiment lui-même et la zone d’accostage.

Le recours à des matériaux simples et le type de mise en œuvre donnent à cet ensemble une expression de légèreté sobre, en référence à l’architecture industrielle. Le matin ou le soir, l’hiver ou l’été, les matériaux s’harmonisent avec la lumière sans cesse changeante de ce site exceptionnel. Entre ciel et lac, la totale réussite du projet ne fait toutefois pas oublier l’impressionnant travail des différentes équipes spécialisées qui ont permis au chantier de se dérouler sans encombres.

Sur les deux bâtiments (maison de la pêche et restaurant) les Services Industriels de Genève dans le cadre d’une convention les liants à l’État de Genève ont mis en place une installation solaire de presque 2’000 m2 de panneaux photovoltaïques. L’électricité produite est utilisée principalement par les locataires des 2 bâtiments, le surplus est absorbé sur le réseau électrique SIG. La puissance annuelle totale de cette installation permet d’alimenter environ 100 ménages sur le canton de Genève.

Les constructions sont de qualité THPE (très haute performance énergétique). La production de chaleur et de froid est assurée par des pompes à chaleur eau-eau alimentées par l’eau du lac.

INTERVENTION ARTISTIQUE

Carmen Perrin, artiste plasticienne, a réalisé une oeuvre murale sur la façade Sud de la maison de la pêche, qui reproduit partiellement un dessin à la plume et au pinceau de Peter Brueghel l’Ancien, «Grandibus exigui sunt pisces piscibus esca», réalisé en 1556.

Son intervention, sur l’image d’origine, a consisté à inverser les tonalités chromatiques, de façon à transformer la lumière du jour, en un crépuscule qui plonge cette scène fantastique dans une luminosité monochrome indigo et en accentue la beauté énigmatique. L’étonnement que la force de cette image éveille, encore aujourd’hui dans notre esprit, soulève une question: «combien de temps, l’homme pourra-t-il encore vivre de cette ressource locale?».

Cette intervention artistique, imprimée sur un support métallique porte le titre «Les gros poissons mangent les petits». Juste en face de l’intervention artistique, une longue image imprimée sur un support métallique est fixée à la main courante de la passerelle qui mène à la plage et au restaurant. Cette image a été conçue par le graphiste Pablo Lavalley de l’atelier Officio à Genève. Face à un congénère qui semble les observer, des poissons nagent dans un dégradé de couleurs astucieusement déployé dans une eau cristalline. Au bas de l’image on peut lire: «Les lacs sont les sentinelles du changement climatique. Inéluctablement, le réchauffement du Léman affecte l’équilibre du brassage des eaux, essentiel pour la survie de la faune et de la flore».